How to save the world? (A-t-il seulement besoin d'être sauvé?)
Je suis allée, il y a quelques jours de ça, prendre un café avec un ami que je n'avais pas vu depuis un moment (je sais que tu te reconnaîtras, pardonne-moi à l'avance de te prendre comme exemple..mea culpa!). Au milieu de la prise de nouvelles habituelle (Ça va? La famille va bien? Les études aussi?), voilà qu'il me dit qu'il s'est trouvé une nouvelle passion: l'environnement. "Je me cherche une cause", dit-il, m'expliquant qu'il trouve qu'il y a tellement de choses à défendre. Il faut se battre pour protéger notre planète terre.
Évidemment, que pouvais-je dire à l'encontre de ça? Tout à fait d'accord, il faut se battre pour protéger l'environnement. Évidemment qu'il faut le protéger, conscientiser les gens et obliger les entreprises à réduire leur pollution, ou autres. J'enchaîne donc, en lui demandant tout bonnement ce qu'il pense des gaz de schistes, lui futur superman environnemental. "Les gaz de schistes?", me répond-il, avec un regard interrogateur. Étonnée, je lui réponds: "...On en parle depuis des mois, c'est LE sujet d'actualité au Québec!". "Ah... mais tu me connais, je ne regarde pas les nouvelles". (Pour sa défense, depuis, il s'est informé et connait mieux le dossier!)
Aïe. Aïe. No wonder que ce groupe qu'on appelle "gauchistes" manquent de crédibilité. Pourtant, cet ami est quelqu'un de très intelligent, étudiant modèle à l'université et très connaissant de ce qu'il étudie, justement. Mais, à force de vouloir "se trouver une cause", il a oublié qu'il devait d'abord "se donner de la crédibilité". C'est-à-dire lire les journaux, regarder les nouvelles, surfer sur internet... se tenir au courant, pour résumer le tout. On ne peut pas se prétendre militant pour l'environnement (militant tout court) si on ne sait pas ce qui se passe. Surtout si, de l'autre côté, il y a des gens plus ou moins gauchistes (on va dire très centristes), assez réticents sur les discours "je vais sauver le monde", qui travaillent forts sur le dossier et ont déposé un mémoire au BAPE. Ceux-là sont au courant et ceux-là ont donc la légitimité et la crédibilité de revendiquer.
C'est aussi une question de jugement. De rationalité. Même si le sujet n'a rien à voir avec l'environnement. En discutant avec une autre amie, française, celle-ci me dit ne pas avoir de médecin généraliste, car elle est contre le principe. Le principe de quoi? Le principe qu'en France, on doit passer par un généraliste pour pouvoir aller voir un spécialiste. Elle préfère donc aller directement chez le spécialiste et payer plus cher, par principe. Comme je ne comprenais pas, je lui ai demandé: Mais QUEL principe? "Le principe que je sais où je dois aller, je n'ai pas besoin de perdre mon temps chez le généraliste". D'accord. Mais est-ce que tout le monde est au courant de quel spécialiste aller voir selon les symptômes? Il y en a plus évidents que d'autres, mais parfois, ce n'est vraiment pas "évident". Ça évite que les gens fassent perdre le temps de médecins qui ont déjà assez de boulots comme ça. Donc, où est le problème? "Bah c'est contre ses principes." (Je n'ai aucune idée de l'efficacité de cette loi en particulier, ce que je critique ici c'est surtout l'argumentation faible du "principe". )
Ce qui me dérange vraiment dans tous ça, c'est que si les arguments que l'on apporte sont aussi peu convaincants, alors comment peut-on être si convaincus d'avoir raison? Je sais bien qu'à vingt ans, on pense tout connaître et tout savoir, mais ne peut-on pas également avoir un minimum de jugement critique? J'ai l'impression d'être envahie, depuis quelques temps, par cette jeunesse "je-sais-tout" (dont je fais partie et dont je ne suis pas complètement sortie, of course). C'est épuisant. J'aime l'implication des gens, j'aime leur intérêt pour certaines causes, mais qu'est-ce que j'ai hâte à l'étape suivante! L'étape où le recul sera fait et où on aura compris qu'il faut prendre un autre angle d'approche, un autre chemin, pour faire changer quoique ce soit. Lequel? Je ne sais pas. Mais certainement pas celui de l'aveuglement.